Pass Patrimoine 600 monuments 2022 page
19/07/2023
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Sur la Route des Châteaux de l'Aube

Le saviez-vous ? Situé au cœur de la Champagne historique, le département de l’Aube a compté plus de 300 châteaux dans son histoire. S’il n’en reste plus qu’une petite centaine aujourd’hui, ces châteaux défensifs, mottes castrales, maisons seigneuriales ou demeures de plaisance ont façonné politiquement et économiquement le territoire.

Classés ou inscrits au titre des Monuments historiques, ils racontent l’histoire de leurs bâtisseurs et de leurs illustres propriétaires.

Naissance de la route des châteaux de l'Aube

C’est pour préserver et valoriser ce riche patrimoine qu’est née la Route des Châteaux de l’Aube. Ce projet, initié par l’Agence Départementale de Tourisme de l’Aube et les Archives Départementales, rassemble, sur un site internet dédié, 31 châteaux publics et privés, ouverts ou non au public.

Le lancement de cette route des châteaux a vocation à faire mieux connaître ces édifices et leurs spécificités au grand public. Le nombre de sites référencés sur la Route des Châteaux de l’Aube devrait augmenter avec l’ajout de six nouveaux châteaux dans l’été.

Découvrez le passé de quelques-uns de ces monuments, ouverts à la visite ou proposant de séjourner dans leurs murs séculaires.

Le château de Riceys-Bas et la famille de Taisne

Château de Riceys-Bas ©Histoires de Patrimoine

Au cœur du village des Riceys, situé dans la vallée de la Laignes et entouré du vignoble de Champagne, le château de Riceys-Bas compte parmi les plus anciens de la région. Également appelé château de Taisne, son histoire remonte au XIe siècle.

Robert, seigneur des Riceys, érige sur ce territoire une première forteresse vers 1086. Au cours de la guerre de Cent Ans, l’édifice est incendié par les armées anglaises de Jean de Lancastre, duc de Bedford. Le cellier, datant du XIIe siècle, échappe aux flammes. Ses voûtes en croisées d’ogives peuvent encore être admirées aujourd’hui.

C’est avec Nicolas Rolin, chancelier du duc de Bourgogne et fondateur des hospices de Beaune, que le château des Riceys-Bas connaît un renouveau. À partir de 1424, Nicolas Rolin restaure l’une des tours, appelée la Tour Robert, et construit de nouveaux bâtiments.

Au fil des siècles, les familles se succèdent et laissent leur patronyme aux tours du château : tour Laval, tour Créqui, tour d’Amboise. L’une des familles, les Pomereu, transforme, au XVIIe siècle, la forteresse. Le château-fort laisse place à une demeure de plaisance. Ils dotent le domaine de Riceys-Bas de magnifiques écuries et d’un jardin à la française.

Au XVIIIe siècle, la Révolution française touche le château en plein cœur : destruction de trois des sept tours, armoiries martelées, archives brûlées. Les Houet, famille d’exploitants et de négociants de vin, reprennent le château dès 1801 pour le remettre en état. Tout au long du XIXe siècle, les restaurations se poursuivent avec la famille de Taisne qui hérite du domaine.

Aujourd’hui, la famille de Taisne, vit toujours au château. Elle poursuit les missions de préservation et de valorisation de domaine. Si les intérieurs de la demeure ne sont pas accessibles, exceptés le cellier, la grande cuisine et les dépendances, la visite permet de partir à la découverte des jardins grâce à un parcours pédagogique, un goûter sur l’herbe ou une balade bucolique.



Vue sur le château de Riceys-Bas et le village des Riceys ©Histoires de Patrimoine

Le château de Vaux à Fouchères : sauvetage d'une demeure du XVIIIe siècle

Le château de Vaux ©Histoires de Patrimoine

L’histoire du château de Vaux, édifié au milieu d’une forêt verdoyante, débute au XIIe siècle. Les textes conservent encore les traces d'un premier castel féodal. Cette maison seigneuriale, délaissée au cours des siècles, est rasée au XVIIe siècle.

En 1720, Jacques d’Aubeterre, issu d’une noble famille de Troyes, confie la construction d’un nouveau château à Germain Boffrand, brillant architecte du roi et élève de Jules Hardouin-Mansart. Devenu comte de Vaux, Jacques d’Aubeterre se lance dans un chantier titanesque. Il fait venir des ardoises par bateau depuis Paris et des pierres de Tonnerre à dos de mulets. À sa mort en 1726, le chantier est inachevé. Sa famille, ruinée, vend le domaine à François Rémond, marquis de Montmort, qui parvient à terminer les travaux et à aménager les intérieurs du château. À la Révolution française, il est contraint de s’exiler en Angleterre, abandonnant le château aux mains de l’administration de la Première République.

Un proche de Napoléon III, Charlemagne-Émile de Maupas, achète le domaine en 1855. Également préfet de police de Paris, ce personnage haut en couleur mène des enquêtes sur les députés et les hauts-fonctionnaires de l’époque. À travers la capitale, il envoie ses espions, dont le fameux Eugène-François Vidocq. Maupas vit entre Paris et Vaux dont les murs restent encore imprégnés de ses mystérieuses enquêtes. Il y passe les dernières années de sa vie jusqu’à sa mort en 1888.


L'intérieur du château de Vaux ©Histoires de Patrimoine

Il faut attendre 1970 pour que les communs du château soient réhabilités et utilisés pour accueillir des jeunes filles handicapées. C’est en 2015 que la demeure est finalement achetée, par Édouard Guyot, cadet de cette célèbre famille en faveur du patrimoine. Alors âgé de 23 ans, il s’endette à hauteur de 500 000 euros sur trente ans. Lorsqu’il s'installe au domaine, le château est au bord de la ruine totale. Après de longues décennies d’abandon, Édouard Guyot entame de lourdes restaurations avec l’aide bénévole des habitants des environs, accompagné par la DRAC.

Il réaménage en priorité les communs afin d’accueillir des événements et notamment des mariages. Cette source de revenus lui permet de financer les premiers travaux de restauration du château, toujours en cours aujourd’hui.

Pour les visiteurs du château, des expériences immersives sont imaginées chaque année, afin de découvrir l'édifice en résolvant des énigmes inspirées par l'histoire du lieu et de ses occupants. L'histoire et le parcours évoluent au gré de la réhabilitation des pièces : si les cuisines et les caves sont entièrement accessibles, il faudra encore attendre deux ou trois ans pour explorer l'intégralité du rez-de-chaussée.

Le château de Brantigny : le classicisme à Piney

Chambre d'hôte au château de Brantigny ©Histoires de Patrimoine

Ce château tire son origine de la famille de Brantigny, qui érige au XIIIe siècle une première demeure en ce lieu. Victime au cours des siècles de plusieurs incendies, l’édifice s’écroule.

Il faut attendre l’arrivée de la famille des Réaulx, en 1658 pour voir s’élever un nouveau château bâti de pierres claires et des tuiles. À la veille de la Révolution française, Brantigny rayonne à travers la région par son architecture classique. François-Louis, seigneur des Réaulx, est guillotiné en 1794, son château devient bien national.

Au cours du XIXe siècle, plusieurs familles se succèdent au château de Brantigny. La demeure est finalement occupée par les Allemands durant la Seconde Guerre mondiale. En 1950, la famille Prod’homme-Collignon acquiert le domaine redonne à l’édifice tout son éclat. Brantigny accueille une école jusque dans les années 1970.

Puis, les propriétaires transforment les lieux en de vastes chambres d’hôte qui comptent parmi les 200 plus belles de France.

Chambres XVIIIe siècle ou hébergement insolite au bord de l’étang, le château de Brantigny propose des séjours inoubliables au cœur d’un paysage verdoyant.


Château de Brantigny ©Histoires de Patrimoine

Le château de Géraudot : sur les bords du lac d'Orient

Château de Géraudot ©Histoires de Patrimoine

Cette demeure du XVIe siècle, située dans le village de Géraudot, appartient à l’origine à une illustre famille de la seigneurie d’Aillefol, les Bauffremont. La maison devient ensuite propriété de Louis III de Vienne, conseiller au Parlement de Paris, puis de Jean-Baptiste Fleuriau de Morville, ministre d’État sous Louis XV.

Au fil des siècles, les propriétaires du château sont nombreux. C’est à la fin du XXe siècle que le domaine est repris par Florence et Uwe Schäfer et transformé en chambres d’hôte et gîte. Situé dans le Parc naturel régional de la forêt d’Orient, la façade sobre de la demeure, agrémentée de tuiles brunes, offre tout le charme des siècles passés.

Pour découvrir, depuis le ciel, les paysages de Champagne et notamment les lacs d'Orient et d'Auzon-Temple tout proches, une montgolfière pilotée par le propriétaire vous offre un merveilleux voyage ! Golf, randonnées, vélo ou canoë, de multiples activités en plein air sont à découvrir autour du château de Géraudot !


Chambres d'hôte et gîte au château de Géraudot ©Histoires de Patrimoine

Le château de La Cordelière, golf à Chaource

Le château de La Cordelière ©Histoires de Patrimoine

Au XVIIe siècle, des moines cordeliers de l’ordre de Saint-François, s’installent sur ce plateau, au cœur d’une forêt, à trois kilomètres de Chaource. Les moines donnent leur nom à la première demeure construite en 1780 à cet emplacement : la petite Cordelière. C’est Nicolas Parent, avocat du roi Louis XVI, qui est à l’origine de ce projet de construction. Décapité en 1794 pendant la Terreur, Nicolas Parent meurt en laissant derrière lui une demeure inachevée.

Entre 1892 et 1900, une autre bâtisse est construite face à la petite Cordelière, à l’initiative de Frédéric Chandon de Briailles, fils de Pierre Gabriel Chandon, le fondateur de la célèbre maison de champagne Moët et Chandon. La demeure est érigée en style Renaissance.

Le château de la grande Cordelière est inauguré en 1900 avec de somptueuses fêtes auxquelles participent les habitants de Chaource. Le fils de Frédéric, François, hérite du domaine et épouse l’héritière du château de Vaux, Odette de Baudreuil de Fontenay. En 1933, il fait ériger une chapelle en style néo-gothique pour abriter le caveau familial.

Au cours de la Seconde Guerre mondiale, le château de La Cordelière sert de lieu de dépôt pour les vitraux de l’Aube ainsi que pour les archives précieuses du département. François Chandon de Briailles est déporté en camp de concentration en Allemagne, d’où il parvient à revenir vivant. Le château est finalement vendu par ses descendants, qui dispersent le mobilier, les tableaux et la vaisselle dans des ventes aux enchères.

Le domaine est acheté par le golf de Troyes en 1958 qui occupe les 50 hectares de bois. Le château devient le club-house du golf, avant d’être vendu pour accueillir un hôtel qui ouvrira ses portes en 2024.

Le film Les Trois Mousquetaires, réalisé par Martin Bourboulon en 2023, a été tourné en partie dans ces décors naturels du château de La Cordelière, vous pouvez notamment reconnaître son somptueux escalier.


Le golf au château de La Cordelière ©Histoires de Patrimoine

Château de Barberey-Saint-Sulpice : splendeur du style Louis XIII

Le jardin à la française au château de Barberey-Saint-Sulpice ©Histoires de Patrimoine

Longé par la Seine, Barbariacum est d'abord un castrum gallo-romain qui défend Augustobona, nom romain de Troyes. Bâtie sur une motte castrale au XIIIe siècle, la maison forte de Barberey devient, au XVIe siècle, le fief de Guillaume du Plessis, bailli de Troyes, puis celui du gouverneur de la ville, Charles de Choiseul-Praslin. Il occupe la demeure seulement quelques années et la vend à Louis Le Mairat, seigneur de Droupt-Saint-Basle, négociant et maire de Troyes. Ce dernier entreprend des travaux de grande envergure et dote le château de fossés et d’un pont-levis.

C’est son fils, Jean Le Mairat, conseiller du roi Louis XIII, qui fait édifier, en 1626, le château tel que l’on peut l’admirer aujourd’hui. Avec sa pierre blanche, ses briques rouges et son toit d'ardoises, il correspond au style typique de son époque. Il reste dans la famille jusqu'en 1720, avant de changer deux fois de mains avant la Révolution. Vendu comme bien national à la Révolution française, les familles propriétaires du château de Barberey se succèdent jusqu'au milieu du XXe siècle.

Occupé pendant la Seconde Guerre mondiale puis vandalisé et abandonné, l’édifice est sauvé de la démolition par l’architecte décorateur Pierre Scapula. Il est finalement racheté en 1964 par un médecin qui entreprend de grands travaux de restauration. Recréé en 1965, le jardin à la française correspond à un plan du XVIIIe siècle, retrouvé récemment. Autour du château, un somptueux parc de 10 hectares, classé Jardin remarquable, est ouvert au public chaque été.


Château de Barberey-Saint-Sulpice ©Histoires de Patrimoine

 

Le château de La Motte-Tilly : des propriétaires de prestige

À la fin du Moyen Âge, le château de La Motte-Tilly connaît en un siècle, trois illustres propriétaires. En 1366, Marie de Châteauvillain, baronne de Baye, cède la forteresse de La Motte-Tilly à Guillaume de Melun, archevêque de Sens. Puis, en 1423, le château est donné par le Dauphin Charles VII à Jean de Puligny, son garde des coffres et joyaux. Enfin, en 1470, le roi Louis XI l’offre à son chambellan, Jean Raguier.

Au XVIIe siècle, d’autres prestigieux personnages se succèdent à La Motte-Tilly : le duc de Bournonville, gouverneur de Paris, puis le duc de Noailles, ministre des Affaires étrangères de Louis XIV.

C’est au XVIIIe siècle, que l’abbé Joseph-Marie Terray, contrôleur général des finances et abbé commendataire de Molesme, acquiert le domaine grâce à la fortune de son oncle, médecin de la princesse palatine, Élisabeth-Charlotte de Bavière, épouse du Régent Philippe d’Orléans. En 1754, l’abbé demande à l’architecte François-Nicolas Lancret de nouveaux plans pour remplacer la forteresse médiévale en une résidence de campagne des bords de la Seine. Les élégantes façades et les arcades détachées du corps principal donnent au château une allure exceptionnelle. Son neveu, Antoine-Jean, prend la suite des travaux en dessinant notamment un parc à l’anglaise. Guillotiné durant la Révolution française, tous ses projets ne voient pas le jour.


Château de La Motte-Tilly ©Studio OG

Après la chute de Napoléon Ier en 1814, la France est envahie notamment par les Russes. Les Cosaques s’installent au château de La Motte-Tilly et ruinent l’édifice en utilisant le parquet pour se chauffer.

Le domaine est peu à peu remis en état, mais c’est avec le comte Gérard de Rohan-Chabot que le château renaît à partir de 1910. Les restaurations menées redonnent à la Motte-Tilly tout son éclat du XVIIIe siècle. En 1964, la marquise Aliette de Maillé, reprend à la mort de son père, les travaux. Présidente de la Sauvegarde de l’Art français, elle installe dans les appartements de splendides collections de meubles, de tableaux et autres objets d’art du XVIIIe siècle.

À sa mort, le château de La Motte-Tilly est légué à la Caisse Nationale des Monuments Historiques et des Sites, ancêtre du Centre des Monuments Nationaux. Selon sa volonté, la décoration et les aménagements sont restés identiques à ceux qu’elle l’a laissé.

Pour découvrir ce fabuleux domaine et son histoire, des visites thématiques, activités familiales et événements dans le parc ponctuent l’année du château de La Motte-Tilly !


Grand escalier du château de La Motte-Tilly ©Studio OG

Article réalisé en partenariat avec l'Aube Champagne

Découvrez tous les trésors de la Route des Châteaux de l'Aube !

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